Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières : Quelles sont les impacts du CBAM pour les entreprises ?
Avec l'introduction du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (en anglais Carbon Border Adjustment Mechanism, CBAM) de nombreuses entreprises des secteurs industriel et commercial dans l'Union européenne sont confrontées à des changements importants : Depuis le 1er octobre 2023, les entreprises qui importent des biens à fortes émissions, comme l'acier, l'aluminium ou le ciment, en provenance de pays non-membres de l'UE, doivent documenter avec précision les émissions de CO2 directes et, selon le type de marchandises, indirectes, pendant la production et, à partir du 01/01/2026, obtenir les certificats d'émission CBAM correspondants. La taxe compensatoire sur le CO2 doit permettre d'adapter le prix des émissions pour les importations au niveau des produits fabriqués dans l'UE. Cela permet de compenser le désavantage concurrentiel des producteurs européens. Le mécanisme CBAM de compensation des émissions de CO2 complète le système européen d'échange de quotas d'émission (EU ETS), qui a été introduit en 2005 en tant qu'instrument central de protection du climat dans l'UE.
Quels objectifs poursuit l'UE avec le mécanisme de compensation des émissions de CO2 ?
- Neutralité carbone d'ici 2050 : L'UE est la première association d'États au monde à viser la neutralité carbone d'ici 2050. Afin d'atteindre cet objectif, près de trois quarts des émissions de CO2 en Europe seront à l'avenir intégrés dans le système d'échange de quotas d'émission.
- Réduire les émissions de CO2 : Dans le cadre du paquet « Ajustement à l'objectif 55 », la première étape consiste à réduire les émissions de CO2 de 55 % par rapport au niveau de 1990 d'ici 2030.
- Créer des conditions de concurrence équitables : Outre la réalisation des objectifs de protection du climat, la taxe de compensation sur le CO2 doit également avoir pour effet que les importations en provenance de pays non-membres de l'UE aient des prix d'émission aussi élevés que les biens produits dans l'UE.
- Éviter le « Carbon Leakage » : L'alignement des prix des émissions par le biais du CBAM vise à éviter la délocalisation des sites de production de l'UE vers d'autres pays où la législation sur le changement climatique est moins stricte.
- Passer à des processus de fabrication respectueux du climat : L'augmentation des coûts et l'obligation de déclaration étendue dans le cadre du système d'échange de quotas d'émission incitent les entreprises à concevoir leurs processus de fabrication de manière à réduire les émissions et les polluants.
- Incitation à la réduction des émissions pour les fabricants situés en dehors de l'UE : Le CBAM compense les prix d'émission plus bas pour les biens produits en dehors de l'UE. Cela peut inciter les producteurs non-européens à réduire leurs émissions lors du processus de fabrication afin de rester compétitifs.
Quels sont les groupes de produits visés par le CBAM ?
Le CBAM s'applique à certains produits dont le processus de fabrication est particulièrement intensif en CO2. Il existe en effet un risque important que les produits correspondants soient importés de pays non-membres de l'UE afin de faire baisser le prix d'émission.
Aperçu des produits actuellement soumis au CBAM
(situation en juin 2024)
À l'avenir, la compensation sera étendue à d'autres matières premières à forte consommation d'énergie. Des discussions sont actuellement en cours pour savoir si les polymères, divers produits chimiques et les produits en verre seront également soumis à l'obligation de déclaration à l'avenir. Toutes les entreprises qui importent des produits visés par le CBAM en provenance de pays non-membres de l'UE sont soumises à l'obligation de déclaration CBAM et doivent acquérir les certificats d'émission CBAM correspondants.
Exceptions au CBAM : Quels sont les produits exempts de la compensation des émissions de CO2 ?
En principe, la réglementation CBAM s'applique à toutes les importations de produits visés par le CBAM en provenance de pays non-membres de l'UE. Il existe toutefois des exceptions. Dans les cas suivants, les importateurs n'ont pas d'obligation de déclaration ni d'acquisition de certificats CBAM :
- Marchandises en provenance de pays de l'AELE non-membres de l'UE : Les pays tiers qui participent à l'ETS ou qui ont un système d'échange de quotas d'émission comparable sont exemptés de la taxe de compensation. Il s'agit, actuellement, de l'Islande, du Liechtenstein, de la Norvège et de la Suisse*. Les régions de Büsingen, Helgoland, Livigno, Ceuta et Melilla en font également partie.
- Marchandises à faible valeur : Lorsque la valeur totale des marchandises est inférieure à 150 EUR, l'importateur ne doit pas se conformer au CBAM. Il en va de même pour les marchandises introduites dans l'UE dans les bagages personnels d'une personne.
- Produits renvoyés : Les produits CBAM qui ont été exportés de l'UE vers un pays tiers et qui sont ensuite rapatriés en raison de circonstances inattendues ne doivent pas se conformer au CBAM.
- Objectifs militaires : Si des marchandises sont importées par les autorités militaires d'un pays de l'UE dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune de l'UE ou de l'OTAN, le CBAM ne s'applique pas.
En revanche, aucune exception CBAM ne s'applique aux entreprises ayant de faibles volumes d'importation. Ces dernières sont tenues de présenter des rapports et d'acheter des certificats CBAM au même titre que toutes les autres entreprises.
*Le champ d'application du CBAM dépend du type de marchandises et de l'origine non préférentielle des marchandises.
Achat et prix des certificats CBAM
Le système de compensation des émissions de CO2 se trouve actuellement dans sa première phase de mise en œuvre. À la fin de la période de transition, à partir de janvier 2026, les entreprises des secteurs commercial et industriel devront acheter des certificats d'émission pour importer des produits visés par le CBAM. Le prix des certificats CBAM est basé sur les prix moyens des enchères du système européen d'échange de quotas d'émission. Cela signifie que les entreprises paient les mêmes taxes que celles qui auraient été appliquées si le produit avait été fabriqué dans l'UE. Si l'entreprise peut prouver qu'une taxe sur le CO2 a déjà été payée pour le produit importé dans le pays tiers, ces coûts peuvent être pris en compte dans le certificat CBAM. Cela doit motiver les pays non-membres de l'UE à introduire eux aussi une taxe sur le CO2 sur leurs produits et à faire ainsi progresser la production de matières premières respectueuses du climat.
Reporting dans le cadre du CBAM : Qui est tenu responsable et qu'est-ce qui doit être déclaré ?
L'obligation de déclaration dans le cadre du CBAM incombe à l'entreprise importatrice. Cette dernière doit s'enquérir du volume du produit en tonnes ainsi que les émissions directes et indirectes de CO2 pendant la fabrication dans le pays tiers et les documenter précisément. S'il n'est pas possible d'obtenir ces données auprès du fabricant, des valeurs par défaut définies par la Commission européenne sont utilisées pour le pays d'origine concerné. Pendant la phase de transition jusqu'à la fin 2025, les rapports dans le registre transitoire CBAM seront obligatoires tous les trimestres et, à partir de 2026, les rapports CBAM devront être soumis annuellement.
La Commission européenne a récemment précisé que les règles de l'art. 4 du règlement CBAM 2023/1773 pour le calcul des émissions réelles restent valables et s'appliquent. Les déclarants CBAM (Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières) sont tenus de déterminer et de déclarer les émissions réelles pour chaque importation de marchandises à partir du 01.08.2024, selon les méthodes de calcul prévues à l'article 4 I ou II du règlement CBAM 2023/1773.
Si les déclarants CBAM ne parviennent pas à déclarer les données relatives aux émissions réelles, ils doivent démontrer qu'ils ont fait tous les efforts raisonnables pour obtenir ces données auprès de leurs fournisseurs ou fabricants de marchandises CBAM. Ils doivent utiliser le champ "Commentaires" du registre transitoire CBAM pour documenter leurs démarches infructueuses en vue d'obtenir des données de leurs fournisseurs et/ou fabricants.
Les autorités nationales de mise en œuvre disposent d'une marge d'appréciation dans l'examen des rapports. Nonobstant cette marge d'appréciation, la Commission peut, en vertu de l'article 35, paragraphe 4, du règlement CBAM, demander aux notifiants CBAM de fournir des informations supplémentaires qui complètent ou corrigent un rapport CBAM incomplet ou erroné.
Calendrier du CBAM : Mise en œuvre progressive de la compensation des émissions de CO2
Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières est mis en œuvre progressivement depuis octobre 2023 avec, dans un premier temps, une phase de transition jusqu'en décembre 2025. Pendant cette période, une obligation de déclaration simplifiée s'applique, les certificats CBAM ne devant pas encore être acquis. Ainsi, les entreprises impliquées dans l'importation au sein et en dehors de l'UE peuvent se familiariser avec le système et les obligations de déclaration. De plus, la Commission européenne peut acquérir une première expérience avec le CBAM, qui contribuera à sa mise en œuvre définitive à partir de 2026.
Aperçu des phases
Pendant la phase de transition, les certificats CBAM ne sont pas encore nécessaires pour l'importation et les entreprises ne doivent pas encore s'enregistrer en tant qu'« utilisateurs CBAM agréés ». Une obligation de déclaration simplifiée (trimestrielle) s'applique pour :
- Quantité totale par type de marchandise
- Total des émissions grises
- émissions de CO2 directes (émissions dues au processus de fabrication) en tonnes par produit*
- émissions de CO2 indirectes liées à la production d'énergie nécessaire à la fabrication*
- taxe sur le CO2 éventuellement payée dans le pays d'origine
* Les émissions directes et indirectes peuvent être déclarées sur la base de valeurs par défaut jusqu'au 31 juillet 2024. Cela vaut aussi bien pour le deuxième trimestre 2024 qui vient de s'achever que pour les modifications apportées aux déclarations transmises pour le quatrième trimestre 2023 et le premier trimestre 2024.
La phase de mise en œuvre pour CBAM débute parallèlement à la phase de transition le 31 janvier 2024 avec la remise du premier rapport CBAM. Dans ce cas, il est encore possible d'indiquer les valeurs standard définies par la Commission européenne pour les émissions directes et indirectes de CO2. À partir du 31 octobre 2024, les importateurs seront tenus d'obtenir les données d'émissions réelles auprès du fabricant et de les indiquer dans le rapport CBAM.
Étapes supplémentaires de la mise en œuvre du CBAM :
01/01/2025
- Mise en place et mise en service du registre CBAM
- Les entreprises doivent s'inscrire en tant qu'utilisateur CBAM autorisé
01/01/2026
- Début de la phase d'implémentation
- Les importations ne sont plus autorisées qu'avec des certificats CBAM
- Soumission d'un rapport annuel CBAM (au plus tard le 31/05/2027)
Informations supplémentaires à propos du CBAM dans l'UE
Aujourd'hui, le CBAM est dans la phase de transition, c'est pourquoi il peut y avoir des adaptations dans la réglementation et dans le calendrier de mise en œuvre de la taxe d'égalisation des frontières. Vous trouverez des informations actualisées sur le CBAM et les éventuelles exceptions au CBAM ainsi que les réponses aux questions les plus fréquentes à la page https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1722319007372&uri=CELEX%3A32023R0956.
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